Le bégaiement

DESCRIPTION DU TROUBLE

Le bégaiement ne relève pas d’une cause unique, des facteurs neurologiques et génétiques semblent déterminants associés à des éléments psycho-affectifs, comportementaux et cognitifs spécifiques. Différents facteurs, notamment sur le plan psychologique, seraient responsables de la chronicisation du bégaiement, parmi eux la réaction des proches à l’occasion des premiers signes de bégaiement, que ce soit au sein de la famille ou dans le cadre de l’école.

Le bégaiement n’affecte en rien les capacités intellectuelles de l’enfant qui bégaie. En revanche, il peut mettre l’enfant ou le jeune en grande difficulté pour s’exprimer, surtout face à un interlocuteur qui ne lui est pas familier ou qui l’impressionne.

Le bégaiement se manifeste par :

  • des répétitions insistantes de syllabes ou de mots ;
  • des prolongations de sons ;
  • des blocages sur certaines syllabes

cela dans un contexte de précipitation et d’efforts articulatoires ou plus rarement d’inhibition motrice. Il est souvent accompagné de crispations au niveau du visage, notamment de la mâchoire, pouvant s’accompagner d’une perte de contact visuel avec l’interlocuteur. Les crispations et les ruptures au niveau du contact visuel influencent de manière importante la qualité de la relation entre la personne qui souffre du trouble et ses interlocuteurs. Ces derniers peuvent se sentir mal à l’aise face à ces personnes et évitent parfois les interactions avec elles.

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Quatre types de bégaiement

ToniqueImpossibilité d’émettre certaines syllabes (la première  d’un mot en général). Forte tension musculaire des organes phonateurs (cavités  buccale et nasale, lèvres et pharynx). Expulsion intempestive d’air pour finir le mot commencé.  Exemple : p—–papa.
CloniqueRépétition en chaîne d’une même syllabe ou d’un même son. Exemple : p/p/p/p/papa
TonicocloniqueSuccession de blocages et de répétitions incontrôlables.
Par inhibitionLa personne s’immobilise physiquement et temporairement. Elle ne peut parler normalement qu’après cette « phase ».

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Le plus souvent évident, le bégaiement peut néanmoins se traduire par des signes moins facilement perceptibles :

  • une simple tension ou raideur du corps ;
  • l’évitement ou la fixité du regard ;
  • un léger tremblement des lèvres.

Quelle que soit sa manifestation, le bégaiement constitue un trouble plus ou moins éprouvant. Pénible et fatigant sur le plan physique, il est également pénible sur le plan psychologique car il peut avoir d’importantes répercussions dans la relation à l’autre, générant alors anxiété et baisse de l’estime de soi.

Il faut relever que la gêne ressentie par l’élève n’est pas toujours liée à la sévérité du bégaiement perçue par l’entourage. Un bégaiement peu audible peut être vécu douloureusement, avec manque de confiance en soi et des répercussions négatives sur la vie scolaire.

Le bégaiement n’est cependant pas constant : il peut varier considérablement en fonction des interlocuteurs et des situations de parole (lecture à voix haute, parole spontanée, situation d’examen, etc.).

Les difficultés d’élocution ne se produisent que dans la relation verbale à autrui ; sans interlocuteur la personne bègue ne bégaie pas. Elle est alors capable d’avoir une élocution absolument normale, notamment quand elle est seule ou parfois quand elle chante. De la même manière, la plupart des personnes bègues s’expriment de manière plus ou moins fluente selon l’entourage auquel elles s’adressent. Ainsi un enfant pourra beaucoup bégayer à l’école, à plus forte raison s’il est interrogé devant toute la classe, alors qu’il s’exprimera sans difficulté à la maison. Un adulte pourra avoir bien du mal à dialoguer avec son supérieur hiérarchique alors qu’il discutera aisément avec son conjoint.

La prévalence varie considérablement en fonction de l’âge : environ 5 % des enfants entre 2 et 5 ans sont concernés par ce trouble, contre 1% des adultes. Parmi les élèves, le bégaiement touche plus fréquemment les garçons. Si le bégaiement tend à disparaître de lui-même pendant l’enfance, il peut également ressurgir à l’adolescence, période de changements importants, souvent source de tensions et d’incertitudes, y compris sur le plan scolaire et social (examens, pression du groupe, premières séductions, etc.). Or les sentiments de frustration, d’injustice, de dévalorisation de soi, voire de honte et d’exclusion sont particulièrement difficiles à vivre à l’adolescence.

Le bégaiement, même chez les jeunes enfants à l’âge pré-scolaire, doit toujours être considéré avec précaution et nécessite le plus rapidement possible une orientation vers un thérapeute. Le traitement est le plus souvent assuré par des logopédistes spécialement formés.

Le soutien de l’entourage familial et scolaire reste cependant fondamental pour aider l’enfant ou l’adolescent à dépasser son bégaiement.

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REPERCUSSIONS SUR LA VIE SCOLAIRE ET CONSEILS PEDAGOGIQUES

Répercussions sur la vie scolaire

Dans la mesure où le bégaiement affecte le rythme de la parole et la communication, l’élève porteur de ce trouble rencontre des nombreuses difficultés dans le cadre scolaire, une part importante des activités pédagogiques étant basées sur des interactions orales : lecture à haute voix, prise de parole, exposés, examens oraux, etc.

L’élève est alors particulièrement sensible aux possibles moqueries de la part de ses pairs ou aux signes d’impatience et d’incompréhension de la part de l’enseignant. Par peur de bégayer, il cherche souvent à éviter de prendre la parole, à participer à une discussion en classe ou à répondre lorsqu’il est interrogé, cela même s’il connaît la réponse et qu’il maîtrise le sujet traité.

Les situations d’évaluations orales sont particulièrement angoissantes pour l’élève bègue, son trouble pouvant avoir un impact direct sur son évaluation.


Conseils pédagogiques

L’attitude de l’enseignant revêt une importance majeure pour soutenir et valoriser l’élève qui présente un bégaiement, tant pendant les cours que lors des évaluations orales.

L’élève qui bégaie a besoin d’être compris et accompagné, voire parfois protégé.

Or les enseignants sont souvent peu informés sur ce trouble complexe et ne savent pas toujours comment réagir de manière adéquate vis-à-vis de l’élève. Le bégaiement peut ainsi faire naître chez eux un sentiment de malaise et d’hésitation sur l’attitude à adopter face aux difficultés d’élocution au moment où elles se produisent.

Quelles attitudes adopter vis-à-vis de l’élève qui bégaie ?

  • S’entretenir avec l’élève par rapport à son trouble et déterminer avec lui comment l’aider au mieux : quand et comment l’interroger, comment s’ajuster à sa difficulté et à son anxiété, mettre ensemble au point les modalités et dispositions qui le pénaliseront le moins.
  • Se mettre en relation avec ses parents et le thérapeute de l’élève s’il est en traitement.
  • Adopter un débit calme lorsque l’on s’adresse à l’élève pour diminuer la pression exercée sur celui-ci, démontrer de l’intérêt pour ce qu’il dit en maintenant le contact visuel direct, avoir une expression et un comportement détendus et naturels.
  • Étudier avec lui la manière la plus appropriée pour en discuter avec la classe, par exemple en donnant la parole aux uns et aux autres à ce sujet, en proposant à l’élève concerné de préparer une présentation sur les causes et les manifestations du bégaiement, des thérapies et des techniques de contrôle existantes. Cela pourrait permettre à l’élève de rompre son éventuel isolement et l’aider à se construire une image de lui-même positive et confiante. Il peut également être pertinent d’inviter en classe un logopédiste pour venir parler du bégaiement.
  • Quand l’élève doit lire un texte à haute voix, l’aider en commençant à lire en même temps que lui et en diminuant progressivement cette aide au fur et à mesure que l’aisance revient.
  • Quand l’élève doit faire un exposé face à la classe, lui proposer des dispositions pratiques pour lui faciliter la tâche : utilisation de transparents, de photocopies, d’un plan d’exposé, écriture sur le tableau noir pendant qu’il parle, etc.
  • Être rigoureux face à l’attitude des autres élèves et faire cesser toute éventuelle moquerie relative à son bégaiement.
  • Encourager enfin l’élève à :
    • informer les enseignants de son bégaiement ;
    • ne pas hésiter à dire s’il se sent prêt ou non à participer en classe ;
    • faire une demande de temps supplémentaire pour les examens oraux ;
    • faire part des remarques blessantes ou moqueries dont il aurait pu faire l’objet.

Comment se comporter au moment des difficultés d’élocution ?

Les conseils pédagogiques indiqués ci-dessous ne peuvent être pertinents pour chaque élève concerné. Il est par conséquent essentiel que celui-ci puisse indiquer à l’enseignant quelle aide serait la plus appropriée dans sa situation. Chacun des conseils ci-dessous doit par conséquent être compris comme une proposition.

  • Éviter les trois attitudes suivantes :
    • L’appel (verbal ou non verbal) à la « volonté de maîtriser le bégaiement » : cette attitude n’est pas opportune dans la mesure où elle amène l’élève à augmenter les efforts qu’il fait pour lutter contre les bégayages, ce qui paradoxalement a pour conséquence d’aggraver le bégaiement.
    • L’attitude des suggestions telles : « Détends-toi – Parle moins vite… » ou « Prenez votre temps – Respirez – Préparez vos phrases… « . Cette attitude brise la situation de communication : penser au détail d’exécution de la parole fait perdre de vue la finalité de l’échange.
    • L’attitude de « fausse indifférence » qui consiste à faire comme si de rien n’était, ce qui totalise les inconvénients des deux précédentes.
  • Adopter l’attitude d’un interlocuteur actif et attentif qui consiste à :
    • s’intéresser avant tout à ce que l’élève veut dire ;
    • l’écouter en maintenant un contact visuel naturel ;
    • éviter de le presser de parler ou de passer trop vite à un autre élève ;
    • ne pas hésiter à proposer interrogativement un mot pour le mot qui accroche ou une fin pour sa phrase en panne, cela non pas pour parler à sa place, mais pour relancer l’échange. Ce conseil n’est cependant pas adapté à toutes les situations. La fluidité de parole sera au contraire facilitée pour certains élèves lorsque l’enseignant s’abstient de l’interrompre, de terminer ses phrases ou de dire à sa place le mot qu’il recherche. Seule la discussion avec l’élève concerné permet de mieux répondre à ses besoins.

Le bégaiement lors d’un examen oral

L’élève qui bégaye ne s’attend pas à bénéficier de compassion de la part des examinateurs ni à plus d’indulgence qu’un autre candidat. Toute situation d’examen oral entraîne cependant un surcroît d’anxiété et de stress chez tous les élèves. Ce stress est d’autant plus difficile à affronter pour un élève qui bégaie.

Ce qui importe pour lui, c’est que même s’il le redoute, l’examinateur soit informé de sa difficulté et que son trouble soit reconnu.

Au moment où l’élève est aux prises avec les accidents de sa parole, les conseils donnés plus haut sont également valables lors d’un examen oral.

Lorsque, pendant l’examen, l’élève doit lire un texte ou un passage à haute voix et que cette lecture s’avère difficile, l’examinateur pourra l’aider au démarrage ou dans les passages où il achoppe davantage, en lisant en même temps que lui, en sourdine. Sans doute un tel procédé est-il plus difficile à mettre en œuvre dans le cadre d’une évaluation, cette aide peut cependant atténuer, voire faire disparaître, le bégaiement.

Afin de permettre à l’élève de prendre son temps, parce qu’une parole souple et un débit lent permettent le maintien de la fluidité, et afin d’éviter d’ajouter une pression temporelle trop importante, l’élève peut être autorisé à bénéficier de temps supplémentaire.

Il est en outre conseillé de placer l’heure de passage de telle façon à faciliter l’expression de l’élève : par exemple en le plaçant en fin de liste pour que l’enseignant ne soit pas pressé par le temps et que l’élève ne soit pas dérangé par la présence simultanée d’un camarade préparant sa question. Il peut au contraire être judicieux de placer l’élève en début de liste pour éviter que lors de l’attente il ne soit perturbé par le stress communiqué par ses camarades .

« Le bégaiement : comment le surmonter » – GAYRAUD-ANDEL Mireille/POULAT Marie-Pierre, Le bégaiement : comment le surmonter, Ed. Odile Jacob, 2011, Collection « Guide pour s’aider soi-même ».

Source

Ressources :

Vidéos explicatives : https://www.youtube.com/channel/UCMN9HucmCjgLCt6mKKqV-4A